Aimé Boji Sangara : le nouveau centre de gravité du pouvoir législatif congolais
L’élection d’Aimé Boji Sangara à la présidence de l’Assemblée nationale n’est pas seulement un choix interne du Parlement. C’est un signal politique, un message envoyé aux partenaires régionaux, aux bailleurs internationaux et aux forces qui s’affrontent pour l’influence dans la Région des Grands Lacs.
Avec 413 voix, Boji n’est pas simplement élu. Il est installé au cœur d’un dispositif stratégique où se jouent désormais les équilibres du pouvoir congolais.
Une élection qui consolide l’axe présidentiel
Pour le Président Félix Tshisekedi, cette victoire n’est pas anodine.
Elle répond à un impératif : sécuriser le Parlement en y plaçant un homme capable de garantir la cohésion de la majorité et la stabilité législative dans un contexte de tensions régionales croissantes.
Boji n'est pas un homme du bruit. C’est un homme d’architecture politique.
Il comprend les équilibres internes, maîtrise les codes, et surtout : il n’improvise jamais.
Dans un pays où chaque vote parlementaire peut avoir des implications diplomatiques, sécuritaires et financières, c’est un atout majeur.
Un élu qui rassure Washington, Bruxelles… et inquiète Kigali
Sa réputation de technocrate discipliné, doté d’une solide formation en économie du développement au Royaume-Uni, en fait un interlocuteur apprécié des partenaires occidentaux.
Boji est vu comme un garant de la continuité institutionnelle — un profil qui facilite les réformes budgétaires et structurelles exigées par les bailleurs.
Mais son élection intervient au moment même où l’Est du pays reste sous pression du Rwanda et du M23.
Son ancrage au Sud-Kivu, sa proximité historique avec les enjeux sécuritaires de la région et sa fidélité à la ligne ferme de Kinshasa sont loin de rassurer Kigali.
Le message est clair : le Parlement congolais se place sous la direction d’un homme qui connaît la réalité du terrain et qui ne fléchira pas sur les questions de souveraineté.
Boji, pièce maîtresse dans les équilibres internes de la majorité
Politiquement, son élection scelle un compromis délicat :
- donner un poste stratégique à un cadre de l’UNC,
- tout en maintenant un équilibre avec les forces du CACH,
- sans fragiliser la coalition présidentielle.
Boji n’incarne pas un clan : il incarne une méthode.
Et dans un système politique où l’affrontement interne est permanent, cette méthode vaut de l’or.
Il devient, de fait, un arbitre, un stabilisateur, un coordinateur de la majorité — un rôle qui va bien au-delà des fonctions protocolaires du président de l’Assemblée.
Un Parlement appelé à jouer un rôle géopolitique accru
Les mois à venir seront déterminants pour la RDC :
- réformes économiques exigées par les partenaires internationaux,
- offensives diplomatiques contre l’agression rwandaise,
- consolidation du rôle régional de Kinshasa au sein de la CIRGL, de l’EAC et de la SADC.
Dans cette dynamique, l’Assemblée nationale devient un acteur géopolitique à part entière. Et Boji en sera l’interface.
Les résolutions sur la sécurité, les autorisations d’accords militaires, les lois sur la décentralisation financière ou la gouvernance minière… tout passera par lui.
Une élection qui redéfinit les lignes de force à Kinshasa
Avec Aimé Boji au perchoir, plusieurs phénomènes s’amorcent :
1. Renforcement de l’emprise institutionnelle du Président Tshisekedi. L’exécutif contrôle désormais plus étroitement un Parlement clé dans les arbitrages diplomatiques et sécuritaires.
2. Montée en puissance de l’UNC dans l’architecture du pouvoir. Après la primature, le parti de Kamerhe s’assure une position centrale au législatif.
3. Un interlocuteur plus prévisible pour la communauté internationale, Boji rassure par sa méthode, sa formation et sa constance.
4. Un Parlement qui se prépare à jouer un rôle dans la riposte régionale. L’Est n’est plus seulement un enjeu militaire : c’est désormais un enjeu institutionnel.
Un homme, un mandat, une équation stratégique
Aimé Boji n’est ni un populiste, ni un tribun.
C’est un planificateur, un contrôleur des équilibres, un homme dont la force est silencieuse mais déterminante.
À l’Assemblée nationale, il hérite d’un rôle dont les implications dépassent de loin les frontières de l’hémicycle :
il devient l’un des gardiens institutionnels de la souveraineté congolaise et un acteur clé de la géopolitique régionale.
Son élection n’est pas la fin d’un parcours.
C’est le début d’un mandat où chaque décision, chaque arbitrage, chaque vote aura une portée stratégique.
LK





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